jeudi 2 septembre 2010

Aplomb


On peut reprocher toutes sortes de choses aux autorités qui planent loin, loin au-dessus de nos têtes : de présider à un système injuste, de faire fi de leurs propres principes déclarés, de s'enrichir sur le dos du populo, d'avoir mauvais goût en matière vestimentaire et culturelle et même à l'occasion de ne pas dire toute la vérité. A l'occasion s'ajoute la goutte qui fait déborder le vase, la paille qui casse le dos du chameau, la petite phrase qui enfonce bien le clou : oui, on nous prend pour des cons. Ainsi j'apprends hier que trois soldats français ont été blessés en Afghanistan. Dans un premier temps je me réjouis bien sûr de ce coup porté à la domination impérialiste dans ce pays. Voilà pourtant qu'il est précisé que ce sont les tirs d'autres soldats français qui ont touché les blessés. Décidément les nouvelles sont excellentes : l'armée française est tellement incompétente que la résistance afghane n'a même pas besoin de prendre de trop gros risques, il suffit d'attendre que les militaires se tirent eux mêmes des balles dans le pied, s'écrasent les doigts en enfonçant des clous dans le mur, marchent sur des peaux de banane, se coincent le nez dans leur téléphone portable... Fi ! Voilà que ma joie est gâchée par l'explication de l'Etat-major, laquelle consiste en cette observation stupéfiante : "l'enquête n'a révélé aucune erreur individuelle ou collective." Voilà : trois bonshommes se sont retrouvés à l'hôpital, et personne n'y est pour rien, ni le soldat d'en face qui a cru qu'il s'agissait de talibans, car se méprendre sur l'identité d'une personne ne constitue apparemment pas une "erreur", ni la chaîne de commandements qui aurait pu penser que le terrain, la visibilité, les uniformes employés, bref la combinaison de toutes ces circonstances rendaient l'incident probable - cela non plus n'est apparemment pas une erreur... Les soldats français se tirent les uns sur les autres, mais c'est compatible avec un fonctionnement parfait de l'institution - et on nous explique qu'il n'y a eu d'erreur nulle part, ce qui montre sans doute aussi l'impeccabilité du système d'investigation interne de l'armée, ainsi que l'irréprochable mécanisme de responsabilisation démocratique des forces armées. Ah, mais j'oubliais certaines précisions cruciales : "Les soldats touchés, affirme l'EMA, étaient équipés d'EBI (éléments de balisage individuels) et de "bipeurs" émettant un flash infrarouge. Problème : à 800 mètres, celui-ci n'est pas détectable, et les caméras thermiques, qui ne détectent que les différences de chaleur, ne le voient pas." Un "problème" qui ne saurait cependant causer la moindre erreur, apparemment.

3 commentaires:

  1. Votre humour me réjouis mais votre "je me réjouis bien sûr de ce coup porté à la domination impérialiste dans ce pays" me gêne un peu. Les Talibans sont dans le camp anti-impérialiste ?

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  2. COntent de vous réjouir.

    Les talibans s'affrontent actuellement à l'impérialisme, ils sont donc indiscutablement engagés dans un combat anti-impérialiste.

    Cela dit, il est clair que le "camp anti-impérialiste" n'a jamais été homogène, loin de là - à tel point que parler même d'un "camp anti-impérialiste" me semble d'une utilité faible.

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  3. On a retrouvé la 7ème compagnie !
    :-)

    [On déconne mais c'est avec nos sous tout ça… :-) ].

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